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Freiburg

Mon agonie…

 Mon agonie avait débuté depuis bien longtemps, mais c’était seulement maintenant qu'ils avaient commencé à s’en préoccuper. Allongée sur la civière, j’aperçus quelques visages, certains méprisants, d’autres préférant simplement ignorer mon déclin, ou encore la pâleur des figures inquiètes des enfants innocents. Sous les sanglots de quelques-uns, je suffoquais à la maladie qui me rongeait de l’intérieur, comme le faisaient les insectes venus se loger dans mes immenses plaies infectées. Les minutes devenaient des heures lors de cette acescente attente qui ne finirait peut-être jamais.

Tandis que je m’efforçais de ne pas céder à la tentation de fermer une dernière fois les yeux, malgré la douleur qui grandissait au fil du temps, le brancard sur lequel ma vie s’achèverait probablement atteignit l’arrière de l’ambulance venue me chercher. Une jeune femme en blouse blanche agenouillée devant moi, prit de ses mains chaudes une des miennes en me récitant, au creux de l’oreille, des paroles réconfortantes telles que : « Tout ira bien ! ».

Elle savait la raison de ma souffrance, car elle en faisait partie intégrante, et nous connaissions toutes les deux depuis bien longtemps le seul moyen de m’en libérer, mais il avait fallu attendre la dernière extrémité pour la pousser à s’y résoudre. Sous les bruits ininterrompus des sirènes, j’entendis des pleures presque imperceptibles en provenance de ma gauche. Ma douleur les affectait et, désormais, pour cette unique raison ils me portaient secours après tant d’années interminables. Quand avais-je vu pour la dernière fois de la neige ? ou seulement un minuscule flocon ? Le masque à oxygène, censé me permettre de respirer, intensifia mes maux de tête constants. J’observai une dernière fois le petit espace qui m’entourait avant que ma vision trouble ne laisse place à un noir complet.

Je me réveillai dans un lit d’hôpital, une aiguille plantée dans mon bras et reliée avec une poche remplie d’un liquide transparent. Deux heures s’étaient écoulées et tous les visages attristés que je pouvais distinguer à travers les vitres me signalaient que ma fin ne tarderait pas. Je me sentais succomber petit à petit lorsque je me vis sur le petit écran télévisé de ma chambre. Les gens semblaient affolés et les journalistes n’avaient qu’une seule phrase à la bouche : « La Terre est en danger ».